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Le caribou forestier dans les montagnes russes de l’économie

Au Canada, la superficie de l'habitat de cette espèce vulnérable fluctue au gré du dollar américain

3 juin, 2020  par Université Laval



Vingt-six mille terrains de football. Voilà la superficie d’habitat du caribou forestier qui échappe annuellement aux coupes forestières chaque fois que le dollar américain perd 0,05 $ par rapport au dollar canadien. C’est dire à quel point la conservation de cette espèce, classée vulnérable au Canada, est liée aux soubresauts de l’économie américaine et aux exportations canadiennes de bois vers nos voisins du Sud.

C’est le constat auquel arrivent le professeur Daniel Fortin, du Département de biologie et du Centre d’étude de la forêt, et ses collègues Philip McLoughlin, de l’Université de la Saskatchewan, et Mark Hebblewhite, de l’Université du Montana, dans un article publié par Plos One. «L’idée d’examiner la conservation de l’habitat du caribou forestier sous l’angle de l’économie nous est venue à la lecture de nombreux articles de journaux qui laissaient entendre que les mesures de conservation du caribou faisaient mal à l’industrie forestière», explique le professeur Fortin.

Pour déterminer si le caribou était véritablement un frein à la vigueur de cette industrie, les chercheurs ont réuni des données portant sur la création d’aires protégées pour le caribou forestier, sur les volumes de bois alloués à la coupe et sur les volumes de bois récoltés entre 2001 et 2015 dans sept provinces canadiennes.

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«Nos analyses montrent que lorsqu’il y a une réduction des coupes forestières dans l’habitat du caribou, ce n’est ni en raison de la création d’aires protégées ni en raison d’une réduction du volume de bois alloué pour la coupe. C’est plutôt parce qu’il y a un ralentissement de l’économie américaine. Le volume de bois récolté annuellement est directement lié à la force du dollar américain par rapport au dollar canadien. Chaque baisse de 0,05 $ du dollar américain réduit de 140 km2 les superficies coupées dans l’habitat du caribou forestier», résume le professeur Fortin.

« Notre étude visait surtout à sonner l’alarme pour que l’on réalise que ce qui est fait présentement n’est pas suffisant pour assurer la conservation du caribou forestier. »
 Daniel Fortin

Pendant la période étudiée, l’industrie n’a pas récolté tout le bois auquel elle avait droit. Les coupes représentaient entre 24 % et 87 % des volumes autorisés. «Malgré cela, nous n’avons pas réussi à redresser la situation du caribou forestier au Canada. Ironiquement, on pourrait dire que pour améliorer la situation du caribou forestier au pays, il faudrait que l’économie américaine aille moins bien», souligne le chercheur.

L’industrie forestière canadienne et le caribou forestier ont tous deux un attrait pour les peuplements matures situés en forêt boréale. Les effectifs de cette espèce, qu’on retrouve du Labrador jusqu’au Yukon, seraient d’à peine 33 000 têtes. «Les plans de redressement ne fonctionnent pas comme on l’espérait, constate le professeur Fortin. Notre étude visait surtout à sonner l’alarme pour que l’on réalise que ce qui est fait présentement n’est pas suffisant pour assurer la conservation du caribou forestier.»


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