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L’industrie du bois attend avec impatience la relance économique en 2024

11 janvier, 2024  par Guillaume Roy. Initiative de journalisme local



Après avoir connu des prix records pendant la pandémie, les transformateurs de bois d’œuvre ont vu le prix du bois chuter drastiquement au cours des 18 derniers mois. Plusieurs entreprises qui doivent opérer sous le seuil de rentabilité attendent avec impatience la relance des mises en chantier qui commencent à se matérialiser.

«En 2023, on a dû arrêter nos opérations pour un total de dix semaines pour diminuer les pertes», indique Alain Paradis, le directeur général de Produits forestiers Petit-Paris. À compter de lundi prochain, l’usine de Saint-Ludger-de-Milot fonctionnera à 50% de sa capacité, en attendant de meilleurs prix sur les marchés.

Alain Paradis, directeur général de la Coopérative Petit-Paris.
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Pour faire ses frais, l’usine aurait besoin d’un prix d’environ 650 dollars par 1000 pieds de bois transformé, alors que le marché tourne actuellement autour de 550 ou 560 dollars pour la même quantité de bois. «On perd près de 100 dollars par 1000 pieds de bois transformé», note Alain Paradis, qui se fait souvent demander pourquoi il ne ferme pas l’usine dans de telles conditions. «On veut garder notre monde. Si on ferme pendant trois mois, on va perdre notre main-d’œuvre et ça sera une catastrophe.»

Selon ce dernier, la plupart des usines qui misent sur les produits de commodité au Québec sont dans la même situation, alors que quelques usines qui produisent de la valeur ajoutée arrivent à faire leurs frais.

Un marché en montagne russe

Le marché du bois d’œuvre a toujours connu de grandes fluctuations et il faut avoir les reins solides pour passer à travers les périodes difficiles. «Avec les profits générés pendant la pandémie, on en a profité pour payer nos dettes et investir dans nos usines, mais les derniers 18 mois font mal», remarque Alain Paradis.

Alors que les prix sur le marché sont au plancher, les redevances versées à l’État grimpent en flèche, ce qui limite encore plus la rentabilité des opérations. «Les usines ont acheté du bois aux enchères à prix de fou au cours des deux dernières années pour garder leur usine ouverte, ce qui fait grimper le prix du bois de nos garanties d’approvisionnement», ajoute l’homme, qui espère voir des changements faits au régime forestier.

Un début de relance

La demande pour le bois d’œuvre a commencé à augmenter à la fin de 2023 et tous les indicateurs pointent vers une croissance du marché de la construction en Amérique du Nord en 2024.

Michel Vincent, économiste en chef du Conseil de l’industrie forestière du Québec, croit lui aussi que le marché du bois d’œuvre sera en croissance en 2024… quelques mois plus tard que prévu initialement.

«On doit faire un mea culpa, parce qu’on a cru que la reprise économique serait arrivée plus vite avec la fin des hausses des taux d’intérêt», remarque-t-il.

La relance du marché du bois d'oeuvre est attendue en 2024.

Selon ce dernier, tous les signaux pointent vers une reprise économique, alors que la Réserve fédérale des États-Unis a annoncé la fin des hausses de taux d’intérêt, tout en prévoyant trois baisses en 2024.

Les mises en chantiers sont déjà en croissance au Canada et aux États-Unis, mais l’impact sur les prix du bois d’œuvre tardent à se faire sentir, notamment parce le marché reçoit de gros surplus de producteurs européens, soutient Michel Vincent. « Un insecte ravage les forêts européennes, ce qui force les entreprises à récolter plus de bois que nécessaire », remarque le président directeur général du CIFQ, Jean-François Samray.

Le bois européen est maintenant nécessaire pour répondre à la demande nord-américaine, car le continent n’est plus autosuffisant en bois, renchérit Michel Vincent, mais la conjoncture actuelle, avec le surplus de bois, fait en sorte que les prix restent bas.

Un vent de changement

Alors que c’est la construction résidentielle qui générait le plus de vente dans le passé, le marché de la rénovation tient maintenant le haut du pavé. « La rénovation représente maintenant 40% de la consommation de bois d’œuvre, contre 35% pour la construction résidentielle », remarque Michel Vincent, alors que la balance est consommée par le marché non résidentiel. « C’est un changement complet, parce que la consommation se fait maintenant en petits volumes à la quincaillerie ».

En moyenne, près de 20 millions de maisons sont rénovées par année aux États-Unis, mais les statistiques démontrent que ce taux est en croissance, car l’âge des maisons à rénover croit. « Ce chiffre montra à 25 et 30 millions de maisons en âge de rénovation », note l’économiste.

Étant donné que c’est le marché de la construction aux États-Unis qui dictent la demande en Amérique du Nord, la croissance de la construction au sud de la frontière fera augmenter la demande et ainsi les prix sur les marchés. Pour stimuler le marché et lutter contre la pénurie de logements, les gouvernements devront accélérer l’émission des permis de construction, croit Jean-François Samray.

Selon Michel Vincent, la tempête n’est pas terminée, mais il y de belles années de croissance à l’horizon. « Il y a des opportunités extraordinaires qui s’en viennent pour l’industrie du bois d’œuvre », dit-il, estimant que la demande sera très grande au cours des prochaines années.

Alain Paradis espère que cette relance se concrétisera le plus tôt possible, mais il ne se fait pas d’illusion. « Il y a un décalage entre les annonces de la Fed et les commandes de bois et on s’attend à ce que ça redécolle plus dans la deuxième moitié de 2024 », lance le transformateur qui expédie 50% de son bois au sud de la frontière.


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