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De meilleurs prix de vente pour le bois d’œuvre en 2024

11 avril, 2024  par Guillaume Roy. Initiative de journalisme local



Les montagnes russes sont éreintantes pour les producteurs de bois. Après avoir connu des prix du bois exceptionnels pendant la pandémie, la demande a chuté drastiquement, tout comme les prix qui sont demeurés très bas tout au long de 2023.

La majorité des producteurs de bois québécois opèrent à perte depuis plusieurs mois et ils sont impatients de voir le marché rebondir.

«Depuis octobre 2022, la situation est très difficile pour les scieries québécoises», soutient Jean-François Champoux, le président-directeur général de la Scierie Saint-Michel, à Saint-Michel-des-Saints. Après plusieurs mois d’opération à perte, ce dernier anticipe maintenant une hausse des prix sur le marché. «Les inventaires de nos clients américains sont vides, alors dès qu’il y aura un vent favorable, les prix vont remonter», croit-il.
Jean-François Champoux, le président-directeur général de la Scierie Saint-Michel.
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Les perspectives de reprises sont bonnes, mais il ne faut pas s’attendre à revoir des prix du bois qui ont prévalu pendant la pandémie, estime Dustin Jalbert, économiste sénior spécialisé dans les produits du bois pour Fastmarkets, une entreprise américaine qui analyse les marchés de différents produits de commodité.

Selon les analyses de son équipe, les prix du bois devraient croître de 7 % sur deux ans. La croissance de la demande sera générée par la reprise de l’industrie de la construction.

«Selon nos estimations conservatrices, il existe un manque d’au moins deux millions de maisons unifamiliales aux États-Unis», a remarqué Dustin Jalbert, dans le cadre d’une allocution faite dans le cadre du Congrès de Montréal sur le bois pendant laquelle l’expert a présenté ses prévisions du marché du bois, où près de 1200 acteurs du milieu étaient rassemblés, à l’hôtel Le Reine Élisabeth.

Ce dernier a également souligné que les marchés de la construction sont très locaux et différents.

Par exemple, la construction de nouvelles maisons consommera la majorité du bois dans le sud des États-Unis, alors que le marché de la rénovation accaparera la part du lion dans le nord-est et en Californie. À Boston, 78 % du bois vendu est destiné au marché de la rénovation, ce qui illustre un changement de paradigme dans l’industrie.

Dustin Jalbert, économiste sénior spécialisé dans les produits du bois pour Fastmarkets, lors de sa conférence présentée dans le cadre du Congrès de Montréal sur le bois.

L’ombre des tarifs

Un ombre vient toutefois obscurcir cette bonne nouvelle pour les producteurs canadiens, car les États-Unis ont annoncé leur intention d’augmenter la taxe sur les importations canadiennes de bois d’œuvre.

À compter du 1er août 2024, cette taxe passerait de 8,05 % à 13,86 %. Dustin Jalbert croit que cette taxe pourrait même être encore plus élevée lors de prochaine évaluation des tarifs douaniers… à moins qu’il n’y ait une résolution du conflit d’ici là.

Pendant ce temps, les producteurs européens, qui n’ont pas de taxes sur le bois d’œuvre à payer, grugent de plus en plus de parts de marché, alors que les importations sont passées d’un million à 4,5 millions de mètres cubes de bois entre 2016 et 2023.

Jean-François Champoux déplore l’iniquité avec les producteurs européens qui, eux, n’ont pas de tarifs douaniers à payer.

«On serait plus compétitifs sur le marché si c’était équitable pour tout le monde», dit-il. La hausse des taxes américaines est déplorable, mais cette décision fait augmenter les prix du bois pour les producteurs américains, et ultimement pour les consommateurs.

Comme cette taxe est absorbée par le marché, les producteurs canadiens devraient tout de même profiter d’une embellie, croit le PDG.

Trop lent pour baisser les taux d’intérêt

La Banque du Canada surestime les impacts de l’inflation et elle devrait abaisser les taux d’intérêt le plus tôt possible, a pour sa part mentionné Benjamin Tal, directeur général et économiste en chef adjoint de Marchés mondiaux CIBC.

Benjamin Tal, directeur général et économiste en chef adjoint de Marchés mondiaux CIBC.

Ce dernier souligne que le Canada est le seul pays de l’OCDE, avec l’Islande, à calculer le taux d’inflation en incluant le coût des hypothèques. Ce calcul vient fausser l’image réelle de la situation, car les taux d’intérêt font grimper les hypothèques.

«C’est comme un peu comme si on mettait un humidificateur et un déshumidificateur dans la même chambre», a-t-il lancé à la blague. En excluant les hypothèques, l’inflation est de 1,5 % au Canada, soit sous le seuil «arbitraire» de 2% fixé par la Banque du Canada.

Selon ce dernier, la Banque du Canada a une bonne marge de manœuvre pour baisser les taux d’intérêt avant la Réserve fédérale des États-Unis (Fed), car les taux différaient de 0,75 % avant la pandémie, alors que cette différence n’est que de 0,25 % aujourd’hui.

Benjamin Tal croit que la Fed bougera lentement, abaissant de 0,50 % d’ici la fin de l’année, avant d’atteindre et de se stabiliser à un niveau de 3 % en 2025.

Ce niveau sera plus élevé qu’auparavant, mais les industries pourront prospérer. «Le coût de l’argent était mal évalué», croit-il, ajoutant que l’économie s’en portera mieux.


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