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Éditorial: Mieux se préparer à la réalité des feux

Des programmes doivent être mis en places pour assurer la viabilité des entreprises forestières, car d’autres saisons de feux de forêt intenses sont à venir.

4 octobre, 2023  par Guillaume Roy



2023 est l’année de tous les records en ce qui a trait aux feux de forêt. Au moment d’écrire ces lignes, au début août, on comptait déjà 1,5 million d’hectares de forêts commerciales brûlées, au sud de la limite de récolte. En zone nordique, c’est 3,6 millions d’hectares de forêts supplémentaires qui sont partis en fumées, pour un total de 5,1 millions d’hectares, tous des chiffres records pour le Québec. C’est l’équivalent de toute la superficie du Costa Rica!

Ces feux ont bouleversé toute l’industrie forestière en début de saison, car l’accès à la forêt a été imposé pendant plusieurs semaines. Après l’arrêt du printemps, l’arrêt forcé par les feux a causé des maux de tête à de nombreux forestiers, qui comptaient travailler dur pour payer leurs termes. 

Les pertes sont énormes pour les forestiers. Selon les données récoltées par l’Association québécoise des entrepreneurs forestiers (AQEF), les entrepreneurs forestiers ont perdu en moyenne 70 500 dollars de revenus pendant les feux de forêt en 2023.

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Certains forestiers ont même perdu leurs machines dans le feu, comme ce fut le cas pour Éric et Sylvain Tremblay. Avec les franchises et les assurances qui ne couvraient pas la pleine valeur du camion de service et d’autres équipements comme les roulottes, les pertes s’élèvent à plusieurs centaines de milliers de dollars. 

Sylvain, 52 ans, a même décidé d’arrêter la récolte. « Je vais vendre mon abatteuse et laisser ça aux plus jeunes », dit-il, préférant se concentrer sur la préparation de terrain avec ses pelles forestières.

Plusieurs opérateurs se sont aussi trouvé un autre travail pendant la pause forcée qui aura duré près d’un mois. En juillet dernier, Frédéric Verreault, le directeur exécutif de Chantiers Chibougamau estimait avoir perdu une douzaine d’opérateurs pendant les feux. 

Malgré les feux et les pertes de revenus historiques, la réponse gouvernementale a été très timide aux yeux des forestiers, avec le lancement d’un programme de 50 millions de dollars offrant des prêts et des garanties de prêts. 

Étant donnée la situation critique, les forestiers s’attendaient à plus. Plusieurs auraient voulu une aide financière pour compenser les pertes et pour l’aide aux employés similaire à ce qui a été offert pendant la pandémie. Dans un cas comme dans l’autre, c’est la sécurité publique qui dictait la marche à suivre.

Pendant la pandémie, c’est Ottawa qui avait offert des subventions pour les employés et les entreprises, alors que Québec s’était contenté d’offrir des prêts. À l’heure actuelle, le gouvernement québécois adopte la même formule avec un programme de 50 millions de dollars pour offrir des prêts et des garanties de prêts aux entreprises touchées par les feux de forêt. Et pour l’instant, aucune aide n’a été offerte par Ottawa. 

Est-ce aux forestiers d’absorber tous les frais liés à la fermeture de la forêt? Comment pourra-t-on assurer une relève entrepreneuriale dans une telle situation? 

Aucune entreprise ne peut se permettre de perdre des milliers de dollars sans impact sur sa viabilité. Les feux forceront probablement certains entrepreneurs à fermer boutique cette année, ce qui empirera la pénurie d’entrepreneurs. 

Au cours des dernières années, le Québec avait été sommes toutes épargnés par les feux de forêt, mais les changements climatiques laissent présager plus d’événements extrêmes. Il faut donc se préparer à vivre plus de saisons où les feux ravageront des millions d’hectares de forêt. 

Idéalement, des compensations financières seraient offertes aux forestiers pour leur permettre d’absorber une partie des pertes. À défaut d’offrir un tel financement, des montants devront être investis dans un fonds pour faire face à des feux similaires. Il faudra aussi investir pour rendre nos forêts et nos communautés plus résilientes face aux feux. 

Ne rien faire et se cacher la tête dans le sable n’est pas une option.  


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