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Trois bioproduits à base de bois à surveiller

Les produits du bois ont encore beaucoup de potentiel à exploiter. En voici quelques pistes intéressantes.

22 avril, 2020  par Émélie Rivard-Boudreault


Prototype de pièces qui a été fabriquée par le polymère mélangé avec du bois en moule (injection) et qui éventuellement, pourrait être fait en impression 3D.

À l’heure où les produits plus écologiques ont la cote et où l’industrie forestière continue de se renouveler, nombreuses sont les recherches qui tentent d’intégrer les résidus de bois à de nouveaux procédés et produits. Le 7 novembre dernier, à La Sarre, a eu lieu le 2e Colloque de la Chaire de recherche du Canada sur la valorisation, la caractérisation et la transformation du bois (CRC-VACAT). Voici trois innovations qui ont été présentées lors de l’événement qui avait pour thème Les bioproduits pour un avenir durable.

Impression 3D
Utiliser le bois en impression 3D est une idée qui séduit le milieu industriel, mais aussi celui des arts. La CRC-VACAT s’est donc alliée au département de Création et nouveaux médias de l’UQAT afin de trouver les meilleurs procédés pour imprimer et créer de nouveaux matériaux à partir des résidus industriels forestiers.

« Actuellement, on fait des produits en bois polymère. Avec le procédé traditionnel, c’est fait par presse à injection, comme un moule. Il y a des limites au niveau de la forme, alors qu’avec l’impression 3D, on peut faire la forme architecturale ou artistique que l’on veut », explique Ahmed Koubaa.

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Dans le domaine des arts, le besoin réside surtout à travailler à partir de matériaux plus écologiques. Grâce à une subvention de 120 000$ du programme Audace et de 230 000$ obtenus du Fonds Nouvelles Frontières en recherche, les travaux vont intégrer trois domaines de recherche, soit les arts, le génie et les sciences naturelles. « En partie, ça va être de travailler avec les imprimantes qui servent, traditionnellement, à imprimer de l’argile, pour créer de nouveaux mélanges et adapter l’imprimante pour l’impression de résidus industriels forestiers », indique à son tour le professeur du département de création et nouveaux médias de l’UQAT, Martin Beauregard qui y voit deux pistes de solution. « La première, c’est de travailler à partir des bouts de papier. L’autre, c’est de travailler à partir des cendres de bois. Il pourrait y avoir aussi la sciure et les copeaux de bois », précise-t-il.

Une fois que les recettes adéquates seront découvertes (dans deux ou trois ans) tant les artistes que les ingénieurs et entrepreneurs pour pourront entreprendre la création, la conception et la vente d’objets d’art, mais aussi de différents objets fonctionnels comme des meubles ou des pièces d’auto, tous imprimés avec du bois!

Isoler avec du bois
L’époque où remplir les murs d’une maison avec du bran de scie est bien révolue. Par contre, l’utilisation du bois pour des isolants, elle, pourrait s’accroître dans les prochaines années grâce des mousses polyuréthane et polyisocyanurate fabriquée avec des copeaux. En attendant, une mousse produite à base de la lignine de bois est sur le point d’être homologuée par le Centre canadien des matériaux de construction (CCMC).

Depuis de nombreuses années, l’entreprise Énerlab travaille à produire des produits de plus en plus biosourcés. « En 2010, alors que la crise financière amenait beaucoup de compétitions avec les grandes entreprises multinationales, donc on a commencé un projet de recherche et développement avec la lignine. Pour les usines de pâtes et papier, [cette composante du bois] était un déchet qu’elles brûlaient pour obtenir de l’énergie », raconte le président Armand Langlois. Aujourd’hui, la lignine est extraite pour une panoplie de produits à valeur ajoutée, dont les panneaux isolants d’Énerlab.

« On a développé la technologie «ISO-Lignine », qui consiste à conditionner la lignine, bien la sécher, à moins de 1% et la mélanger à l’isocyanate pour faire un pré-polymère d’isocyanate-lignine », décrit Armand Langlois. Cette technologie brevetée par Énerlab peut donc être appliquée pour remplacer les produits pétrochimiques par la lignine dans les polyuréthanes. Actuellement, l’entreprise fabrique des polyuréthanes rigides en panneaux, qui peuvent servir à l’isolation, mais peut aussi fabriquer des mousses flexibles qui pourraient servir pour des sièges ou des coussins dans les automobiles ou comme adhésifs dans une panoplie de produits. « On est rendus entre 20 % et 22 % de contenus biologique dans les mousses, mais l’objectif c’est de se rendre jusqu’à 25 % », mentionne Armand Langlois.

La prochaine étape pour Énerlab, sera d’intégrer à ces panneaux des copeaux de bois, des résidus actuellement peu exploités. Pour relever ce défi, elle collabore avec l’UQAT et les chances de réussite sont réussite sont prometteuses. Le professeur de l’UQAT, Ahmed Koubaa est plutôt optimiste, et peut-être même plus. « On a réussi à mettre 30% de fibres de bois tout en gardant les propriétés d’isolation et de propriétés mécaniques sans les affecter », avance-t-il.

Brevetée au Canada, aux États-Unis, en Europe et en Chine, la technologie «ISO-Lignine » sera homologuée par le Centre canadien des matériaux de construction (CCMC) dans les prochains mois. Déjà, elle respecte la norme existante des polysocyanate et est certifiée comme biocontenu avec le département d’agriculture américain via le BioPreferred program.

Peinturer, vernir et coller avec du bois
Dans quelques années, la jolie peinture bleu sarcelle ou blanc « coquille d’œuf » que vous apposerai sur les murs de votre salon ou de votre chambre à coucher pourrait bien être fabriquée avec du bois. Du moins, c’est sur quoi planchent des chercheurs de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) avec Kruger Biomatériaux.

« On travaille pour remplacer la fibre de verre dans les matériaux », résume le professeur de l’UQTR Daniel Montplaisir, qui a fait une présentation lors du colloque à La Sarre. Pour se faire, lui et son équipe travaillent à partir des filaments de cellulose de Kruger Biomatériaux. « On ne peut pas prendre de la fibre brute qui viendrait directement d’une scierie. Ça passe par l’entreprise de pâtes et papier […] des pâtes chimiques comme on appelle : pâte Kraft, pâte mécanique… », explique-t-il.

Dans les laboratoires de l’UQTR, on s’affaire donc à modifier chimiquement les filaments de cellulose pour l’adapter à de différentes plastiques à la place de la fibre de verre. « On obtient des propriétés qui sont assez proches de la fibre de verre », affirme Daniel Montplaisir qui perçoit un potentiel énorme de la technique pour diminuer le poids des matériaux dans l’industrie du transport, elle qui tend à diminuer le poids de ses véhicules et, du même coup, leur consommation de carburant. Quant à la peinture, la cellulose la rend plus épaisse, résistante et facile à étendre. Selon Daniel Montplaisir, ces nouvelles innovations pourraient se retrouver sur les tablettes des quincailleries d’ici un an ou deux.


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