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Opération charme à Parent

Rémabec a investi plus de 10 millions de dollars afin de transformer l’usine pour améliorer le rendement matière et pour attirer la main-d’œuvre.

19 juillet, 2017  par Guillaume Roy


La scierie de Parent vu des airs.

Sur la route forestière 25 au nord de La Tuque, on peut apercevoir les multiples pourvoiries de pêche qui profitent de l’abondance des lacs poissonneux. Sur le bord de la route, on retrouve des piles de bois d’une qualité impressionnante. La raison : c’est la deuxième fois que l’on récolte dans ces secteurs et la fibre est d’une qualité exceptionnelle.

Après plus de deux heures de route, nous passons devant la communauté atikamekw de Wemontaci, avant d’arriver dans la petite communauté de Parent, qui compte aujourd’hui à peine 350 âmes. Et la main-d’œuvre est rare dans cette contrée isolée, à plus de trois heures de route de La Tuque. « Notre gros problème à Parent, c’est le recrutement du personnel », confirme Éric Michaud, vice-président, opérations manufacturières. Et le problème n’est pas de trouver du personnel compétent. Arbec, la filiale de Remabec qui gère les scieries du groupe, peine à trouver du personnel tout court !

Le problème majeur : il manque de place ou loger les travailleurs et les logements disponibles sont inadéquats pour s’y installer à long terme. La solution de Réjean Paré, le président et chef des opérations de Rémabec : construire un camp forestier confortable pour accueillir jusqu’à 200 personnes. « Le camp sera à la dernière mode, avec des chambres individuelles équipées avec internet et la télévision, en plus d’avoir une cafétéria pour bien nourrir les gens, note fièrement Éric Michaud. Ça devrait nous aider à avoir du personnel stable. » Au total, ce sont 3 millions de dollars qui seront investis dans ce camp pour accueillir une bonne partie des 110 employés de l’usine, ce camp servira également à héberger les employés (direct ou des filiales) dédiés aux opérations forestières, à la voirie ou au transport dans le secteur de Parent.

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S’il n’est pas facile pour tout le monde de « s’exiler » à Parent pour aller travailler, les horaires de travail peuvent en charmer plusieurs. « Les employés travaillent 7 jours à l’usine, puis ils ont 7 jours de congé », explique le V.-P. Au lieu d’avoir seulement 4 ou 5 semaines de vacances dans une année, les employés de Parent ont 26 semaines de congé, en plus des jours fériés et des « vrais » jours de vacances ! Travailler à peine 35 % de l’année pour un salaire annuel devient un argument de taille… surtout pour ceux qui aiment la chasse et la pêche.

Pour combler les besoins de main-d’œuvre, Arbec a aussi conclu un partenariat avec la communauté de Wemontaci, explique Pierre-Olivier Lussier, directeur des communications et des relations publiques. « Douze personnes, dont plusieurs mécaniciens, complèteront leur formation à l’usine de Parent au cours de l’été. On espère pouvoir les embaucher par la suite pour encourager l’emploi local. »

Investir dans l’usine
Au même moment où Arbec travaillait à résoudre le problème de main-d’œuvre, l’entreprise investissait aussi massivement dans l’usine pour moderniser les équipements, car l’ancien propriétaire, la papetière Kruger, ne cherchait pas à produire un meilleur rendement matière, préférant produire plus de copeaux pour ses propres besoins.

En fait, l’usine avait manqué d’amour pendant plusieurs années, et Arbec a fait son acquisition en connaissance de cause. Malgré cette béquille, la scierie Parent est située en plein milieu de la matière première et la fibre est d’une excellente qualité, note Éric Michaud.

Pour valoriser davantage la fibre, Arbec a fait l’acquisition de deux scanneurs de Comact, un a l’éboutage et un autre au délignage. Résultat de l’opération : une amélioration du rendement de 3 % et un investissement qui s’est remboursé en moins d’un an.

La scierie travaille également sur la mise en place d’un système d’entretien préventif. « Il n’y avait pas d’entretien préventif avant et il y avait donc beaucoup de bris, explique M. Michaud. On veut prévoir au lieu de répondre aux urgences en réduisant nos couts d’opération. »

La scierie a aussi renouvelé ses têtes d’équarrissage pour installer des produits Andritz, dont deux têtes TGV (à géométrie variable) et deux têtes THN (tête monocoïdale monocoque), adaptées pour les plus petites machines. « Ces têtes arrachent moins la fibre et elles permettent de faire plus de qualité », soutient Éric Michaud. « De plus, elles permettent d’augmenter la vitesse de coupe et d’améliorer la granulométrie des copeaux, explique Pascal Donofrio, directeur des ventes pour Andritz. »

Plusieurs autres changements ont été apportés au classement des billes et sur la manière de débiter le bois. Par exemple, la production de 1×3 et 1×4 ne représentait que 1,5 %, car cette fibre était déchiquetée en copeaux. Aujourd’hui, ces produits représentent jusqu’à 8 % de la production. Ces ajustements ont permis d’améliorer le rendement de près de 15 %. 

La scierie Parent transforme avec une très forte proportion d’épinette noire et de pins gris (à peine 7 % de sapin). Avec ses deux lignes de sciage, Arbec, qui produit du 1×3, 1×4, 2×3, 2×4 et 2×6 de 8 à 16 pieds de longueur, a fait passé la production de 110 M pmp à 170 M pmp, une augmentation de 50 %. « On veut devenir des leaders du low cost (bas prix), pour les produits de commodité. On veut atteindre les niveaux de production pour se comparer aux usines de l’Ouest canadien et du Sud-Est américain », lance Éric Michaud, qui veut diminuer les coûts avant d’augmenter à nouveau le niveau de production.

Cette augmentation du rendement n’a fait qu’augmenter les problèmes à l’empilage. C’est pourquoi Arbec a décidé d’investir dans une empileuse double fourche de Carbotech, qui pourrait encore accueillir une augmentation de production. « C’est une des seules empileuses double fourche au Québec », soutient Éric Michaud. Selon Mathieu Laflamme, directeur du marketing chez Carbotech, c’est le type d’équipement qui convient pour des vitesses élevées au sciage. Après l’installation à l’usine de Parent, Carbotech a fait une journée porte ouverte pour démontrer l’efficacité du produit, ce qui lui a permis de conclure trois autres ventes, dont deux au Québec. « Quand une fourche part, l’autre revient, et l’empilage se fait en continu, ce qui permet d’atteindre des débits plus élevés », note M. Laflamme en ajoutant que le système est complètement automatisé. Par exemple, un système d’optimisation permet de déceler une latte croche et de la rejeter.

Une nouvelle mentalité dans la cour à bois
En plus d’investir dans l’hébergement pour les employés et dans les équipements dans l’usine, Arbec à engager quelques millions de dollars pour asphalter la cour. « Ça fait partie de la mentalité de Réjean Paré, qui a fait le même genre d’investissement à Port-Cartier, à L’Ascension et à St-Roch. Ça fait partie de la mentalité Rémabec », mentionne Éric Michaud. Le but de l’opération : réduire l’usure des équipements roulants et de sciage tout en réduisant les contaminants sur les billes et dans les sous-produits. S’il est difficile d’évaluer le retour sur investissement d’un tel projet, il en demeure qu’il a contribué à améliorer la productivité de l’usine. La cour est aussi gérée par une entreprise spécialisée, RSBL, une autre filiale de Rémabec.

Ce terrain asphalté mène à un autre avantage pour la scierie Parent : le transport par train, accessible à même la cour à bois. « Tout sort par wagon, ce qui nous permet de réduire les coûts de transport », note M. Michaud. Les sous-produits sont écoulés majoritairement en Mauricie et au Lac-Saint-Jean alors que 90 % du bois prend la direction de l’usine de Trois-Rivières pour être jointé. Comme les équipements de séchage ne suffisent pas à Parent, une partie de la production est aussi redirigée vers St-Roch.

Valoriser les écorces
Dans la cour de l’usine, Rémabec a aussi investi 7,2 millions de dollars à travers sa filiale Pyrobiom Énergies, pour la construction d’une usine expérimentale qui vise à transformer des écorces produites par l’usine en huile pyrolitique, du biocharbon et des gaz de synthèse. Ces produits sont destinés à la clientèle industrielle pour remplacer le mazout lourd. Une partie de la production sera aussi utilisée sur le site.

D’autres changements à venir
« On est sur la bonne voie », estime Éric Michaud, malgré l’incertitude amenée par les droits compensatoires de 20 % imposés par les États-Unis. « Ça vient nous dire que l’on doit continuer à améliorer nos installations. On devra être doublement meilleurs pour survivre, en continuant d’innover pour améliorer notre rentabilité ».

À court terme, M. Michaud souhaite consolider son équipe de direction et de cadres à Parent pour amener plus de stabilité. Puis, il souhaite aussi améliorer l’alimentation de l’usine de sciage ou plusieurs équipements, comme l’écorceur et les démêleurs, sont mal conçus et désuets. Mais comme les fournisseurs sont très occupés, l’installation de nouveaux équipements devra attendre à 2018 pour continuer la relance d’une usine qui a trop longtemps manqué d’attention.


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