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Un laboratoire dynamique en torréfaction

MEC Torréfaction vend ses services avant de vendre des fours.

11 avril, 2013  par Guy Fortin


MEC Torréfaction compte sur des temps de traitement très courts (entre 6 et 10 h) grâce à une chambre de refroidissement et de conditionnement (au fond, à gauche) qui permet de libérer plus vite le four.

B ien installée à Victoriaville en droite ligne avec les marchés américains, MEC Torréfaction, filiale à part entière de Séchoirs MEC inc., est devenue, grâce à son four permettant la modification thermique du bois, une vitrine technologique en valeur ajoutée. Avec une capacité de 3 000 pmp par fournée (pouvant atteindre 5 000 pmp selon l’épaisseur du bois), l’entreprise compte sur des temps de traitement parmi les plus courts, soit entre 6 et 10 heures. On a en effet accéléré le processus par l’installation d’une chambre de refroidissement et de conditionnement adjacente au four.

Ce chauffage à très hautes températures aussi bien des essences de bois francs que de résineux stabilise non seulement le bois, mais lui donne des teintes s’apparentant aux bois exotiques. « Nous sommes en quelque sorte un laboratoire, un centre de recherches. Nous raffinons toujours nos recettes de couleurs avec les différentes essences de même que notre productivité, commente le président, Jocelyn Rondeau. Avec trois quarts de travail par jour, on peut faire jusqu’à 20 000 pmp. »

En novembre 2007, après avoir travaillé pendant une dizaine d’années à la mise au point d’un four à torréfaction, MEC Torréfaction s’est mise à la tâche de développer une plate-forme industrielle et commerciale de torréfaction. En août, après un peu moins de huit mois d’exploitation, on totalisait déjà un volume de torréfaction atteignant 700 000 pmp. La capacité annuelle, selon le président, pourrait s’établir entre deux et trois millions de pmp.

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Faire la démonstration
Si l’idée initiale était de vendre des fours aux industriels du bois (et elle l’est toujours en quelque sorte) comme sa compagnie sœur qui vend des séchoirs, cette entreprise de la région des Bois francs a vite compris qu’il fallait également faire la promotion et la démonstration des avantages de cette technologie à valeur ajoutée auprès des scieurs nord-américains. On voulait leur offrir une alternative au traitement de préservation chimique qui ralentit la manutention et l’utilisation du bois, et lui imprime des teintes verdâtres non décoratives.

De fait, la disponibilité immédiate après la torréfaction, les nouvelles couleurs attrayantes du bois, l’amélioration de sa stabilité dimensionnelle et l’augmentation de sa résistance à la dégradation fongique, sont parmi les facteurs les plus importants qui caractérisent le traitement par torréfaction et qui ajoutent de la valeur même aux essences moins commerciales.

« Il faut bien comprendre que l’investissement de base, l’achat d’un four et son installation, tourne autour de 700 000 $ à un million de dollars. Il faut prouver l’efficacité du traitement et convaincre la clientèle. Nous avons pu compter au départ sur trois bons clients qui nous ont fourni des lettres d’engagement et ont permis de faire tourner nos équipements 24 heures par jour, affirme M. Rondeau. Précisons que nous ne vendons pas de bois et que nous ne l’entreposons pas. Nous vendons le service de torréfaction. »

Chaleur et conditionnement
Dès le début, l’expertise en séchage de l’entreprise fut mise à contribution et on a mis en place, en même temps que le torréfacteur, une chambre de refroidissement et de conditionnement afin de libérer plus vite la cellule de torréfaction pour y installer le chargement suivant.

Une fournée normale comptera : entre 4 à 5 heures de montée en température; une étape de 1 à 3 heures à climat de torréfaction qui, dépendant de l’essence et de la recette de coloration, s’établit entre 207 °C et 228 °C; et finalement, une période d’abaissement de température contrôlée d’environ 2 heures. Précisons que la porte du four ne peut s’ouvrir à 170 °C : un système d’alarme se met en marche immédiatement pour éviter l’inflammation du bois à cette température entrant en contact avec l’oxygène.

Lorsque le système de contrôle informatisé aura confirmé que la température du bois est descendue autour de 160 à 165 °C, en moins de 5 minutes, le chargement sera déposé à l’aide d’un chariot élévateur sur des rails vers la chambre de refroidissement en face. Il y demeurera entre 4 et 5 heures. De l’eau à haute pression est immédiatement pulvérisée sur le paquet pour éviter l’encroûtement. Le taux d’humidité du bois à l’entrée varie de 0 et 2 % et on le ré-humidifie pour obtenir un taux entre 3 à 5 %.

« Il est impératif de bien contrôler les temps de montée en température et la période d’abaissement de température. C’est une période critique. Le graphique doit être assez symétrique à ses extrémités sinon les propriétés physiques et la coloration du bois risquent d’en souffrir, précise Jocelyn Rondeau. »

Le four de forme cylindrique pour une meilleure circulation d’air, est alimenté à l’électricité et fonctionne sous un environnement de vapeur surchauffée et il est dépourvu d’oxygène pour éviter l’inflammation du bois. On peut ainsi atteindre des températures élevées (entre 160 °C et 245 °C). Construit en acier inoxydable, il résiste à l’oxydation et aux intempéries et il peut être installé à l’intérieur comme à l’extérieur. Un brûleur pour les gaz d’échappement minimise les rejets atmosphériques et un filtre se charge des vapeurs d’évacuation. À tous les mois, on effectue un arrêt pour le nettoyage, l’équilibrage de l’air et l’entretien des sondes et des petites pièces.

On introduit dans le four des paquets de 54 po de large, de 63 po de haut et de 20 pieds de long. Chacune des couches de bois du paquet est séparée par des lattes d’aluminium de ½ po x ½ po. Une pression est appliquée par une plaque depuis la partie supérieure du four, pour éviter le gauchissement du bois.

Des colorations uniformes
Les recettes de coloration sont très bien contrôlées, elles dépassent la vingtaine toutes essences confondues. « Nous avons déjà effectué des commandes pour l’Europe, mais surtout pour les États-Unis, explique l’industriel. On peut dire qu’on a travaillé avec presque toutes les essences de feuillus et de résineux à l’exception du cèdre. Dans l’ensemble, notre système de contrôle informatisé, nous permet de fournir un produit dont la teinte est uniforme et reproduc-tible d’un lot à l’autre. »

Comme pour toutes les périodes de rodage, des imprévus sont apparus : des odeurs émanaient de l’entreprise installée dans un local adjacent à des bureaux municipaux. L’odeur créosotée n’arrivait pas à se disperser en raison du régime pluvieux de l’été et de la pression atmosphérique. Si bien que les bouches d’aération du bâtiment municipal absorbaient ces odeurs désagréables. « Après discussions avec les dirigeants de la ville, nous nous apprêtons à déménager dans un parc industriel, ce qui réglera cette situation. Mais ce problème nous permet une fois de plus de raffiner notre four à torréfier, ajoute M. Rondeau. »

La stabilité dimensionnelle, qualité première du bois torréfié, convient tout particulièrement pour les bois de plancher, de meubles et de revêtements extérieurs. D’ailleurs, près d’une dizaine de manufacturiers de bois de planchers de la région immédiate de New York sont venus tester avec d’imposants volumes les installations de Victoriaville. Ils se sont dits enchantés des résultats obtenus. La dimension considérable du marché new-yorkais donne une idée des volumes de production potentiels encore à conquérir. « Il y a des possibilités énormes, ajoute en guise de conclusion M. Rondeau. Mais pour obtenir une mise en marché et une commercialisation efficace, il faudra que les grandes surfaces offrent le bois torréfié. Ce serait déterminant. »       


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