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IRIS: l’inclusion de la biomasse dans les données critiquée

16 novembre, 2022  par Guillaume Roy. Initiative de journalisme local


Dans sa note économique sur la transition du secteur industriel, l’IRIS inclut la combustion de la biomasse comme source de gaz à effet de serre (GES), alors qu’elle est considérée par le gouvernement du Québec et l’ONU comme étant carboneutre. Des experts du climat contestent cette façon de présenter les données.

Selon la note économique de l’IRIS, l’usine Fibrek SENC de Produits forestiers Résolu, à Saint-Félicien, est la deuxième usine la plus polluante au Québec en termes d’émissions de GES, avec la production de 1,17 million de tonnes par année, suivie de l’usine Westrock de La Tuque (3e, 1,16 Mt) et de l’usine Domtar de Windsor (4e, 1,14 Mt). La majorité de leurs émissions proviennent toutefois de la combustion de la biomasse par les usines de cogénération qui leur sont rattachées. En l’excluant, Fibrek produit 108 426 tonnes de GES ; Westrock, 205 508 tonnes ; Domtar, 129 511 tonnes. Elles seraient donc respectivement aux 60e, 38e et 57e positions des usines les plus polluantes au Québec.

« L’inventaire québécois annuel des GES du ministère de l’Environnement et des Changements climatiques ne comptabilise normalement pas le dioxyde de carbone provenant de la biomasse, car il considère que le CO2 relâché pendant la décomposition ou la combustion de la biomasse est recyclé par les forêts, notamment grâce à la photosynthèse », peut-on lire dans la note économique.

« Cette façon de faire relève d’une politique de l’ONU désuète qui traite comme carboneutre l’utilisation de biomasse, estiment toutefois les chercheurs. Aujourd’hui, plusieurs scientifiques remettent en question cette pratique. Selon eux, la logique derrière cette affirmation de carboneutralité de la biomasse ne prend pas en compte la dimension temporelle du recyclage d’émissions. […] L’utilisation de la biomasse pour la combustion prendrait donc de 50 à 100 ans pour devenir carboneutre si des arbres sont bel et bien plantés en remplacement de ceux qui ont été coupés. »

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Claude Villeneuve, directeur de la Chaire en éco-conseil à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), estime que l’inclusion des émissions liées à la biomasse vient fausser les données.


« Le CO2 biogénique doit être comptabilisé à part, car il fait partie du cycle dynamique du carbone et il est considéré comme non nocif pour le climat. »
 Claude Villeneuve

Bien que le cycle complet pour capter le carbone peut prendre 100 ans, la communauté scientifique s’est entendue par convention de ne pas inclure ces émissions dans le bilan GES lorsque la biomasse est gérée de manière durable, comme c’est le cas au Québec. « Toutes les solutions renouvelables seront nécessaires pour atteindre nos objectifs de réduction de GES et la biomasse fait partie du panier de solutions pour la transition », estime Claude Villeneuve.

À la cheminée, il est vrai de dire qu’il y a des GES émis, mais il est important de regarder toute la chaîne d’approvisionnement de la source de ces émissions, estime Évelyne Thiffault, professeure à l’Université Laval et experte de la gestion du carbone forestier. « Les émissions en lien avec la biomasse sont déjà calculées dans les émissions du secteur forestier », dit-elle.

En regardant le système forestier dans son ensemble, le bilan carbone est balancé et il est important de faire cette distinction, insiste-t-elle. « La biomasse est un outil de lutte aux changements climatiques, car elle permet de remplacer l’utilisation de carburants fossiles. Son utilisation a été à nouveau reconnue dans le plus récent rapport du GIEC comme piste d’atténuation. »

De plus, l’utilisation de la biomasse génère de la chaleur dans les procédés industriels, ce qui permet de réduire l’utilisation de carburants fossiles.


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