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Bloquer les ravageurs à la frontière pour protéger la santé des forêts et le commerce mondial

6 septembre, 2018  par FPInnovations



En 2009, un rapport rédigé pour le Conseil canadien des ministres des forêts estimait que l’introduction et l’établissement de quatre insectes envahissants et maladies des forêts à haute visibilité coûtaient au Canada 165 millions de dollars par année, un coût qui aurait pu être évité si on avait empêché ces ravageurs d’entrer et de s’établir. L’établissement de ravageurs forestiers exotiques envahissants est à la hausse en raison de la croissance du commerce international, ce qui cause des dommages importants et parfois dévastateurs sur le plan économique et environnemental. La base scientifique des mesures phytosanitaires pour contenir la menace des ravageurs et des maladies des plantes représente un défi crucial pour favoriser un commerce mondial comportant un minimum de risque d’espèces envahissantes.

La Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV) fournit un cadre commun pour atténuer le risque phytosanitaire associé au commerce international. Les palettes, le fardage, les caisses et les boîtes de bois dans lesquels les biens sont transportés font partie des premiers produits forestiers qui se sont montrés vulnérables aux ravageurs, exigeant de l’attention et une règlementation. Les Normes internationales pour les mesures phytosanitaires 15 (ou la norme NIMP 15), ciblent directement la menace posée par les emballages de bois et la nécessité d’un traitement. « Généralement faits de bois de faible qualité qui peut provenir de partout dans le monde, les emballages en bois peuvent être infectés par une variété de ravageurs contre lesquels il faut les traiter », explique Adnan Uzunovic, chercheur principal et mycologue du groupe Construction durable de FPInnovations. 

Lorsque la norme NIMP 15 a été adoptée en 2002, seuls deux types de traitements étaient disponibles pour les emballages en bois : le traitement thermique conventionnel et la fumigation au bromure de méthyle. Le bromure de méthyle est en voie d’être éliminé graduellement, car il est reconnu comme une cause de l’appauvrissement de la couche d’ozone. Comme le traitement thermique conventionnel n’est pas toujours faisable sur le plan économique, de la tolérance des matériaux ou du facteur temps, la majorité des activités de recherche en cours à l’échelle internationale a été consacrée à trouver de nouveaux traitements. L’un de ces traitements est le chauffage diélectrique par micro-ondes ou radiofréquence. La recherche collaborative et les données établies par plusieurs groupes dans le monde, notamment par FPInnovations, ont mené à l’adoption à grande échelle du chauffage par micro-ondes ou radiofréquence et à son introduction officielle dans l’annexe des traitements approuvés par la NIMP 15 en 2013. 

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Des fumigants prometteurs pour remplacer le bromure de méthyle font aussi l’objet d’études, et FPInnovations en examine un. « L’EDN, ou cyanogène, est déjà homologué en Australie et le sera bientôt en Nouvelle-Zélande, et il a été testé dans d’autres pays », explique Adnan. « Nous travaillons avec nos collègues américains pour confirmer son efficacité pour les essences nord-américaines d’arbres dans le cadre d’une collaboration internationale pour appuyer son adoption par la CIPV. » L’équipe est aux premières étapes de la preuve du concept et de son efficacité contre le nématode des pins et plusieurs champignons pathogènes et insectes. S’il est accepté, il faudra encore de deux à cinq ans pour obtenir les données nécessaires à son examen et à son adoption à l’échelle internationale. 

Depuis 12 ans, Adnan contribue de façon marquée au développement, dans le cadre de la CIPV, d’un processus rigoureux d’évaluation des nouveaux traitements phytosanitaires des emballages en bois. « Traditionnellement, les méthodes d’essai et les statistiques relatives aux quarantaines dépendaient de ravageurs à vastes populations qu’on pouvait créer en laboratoire, par exemple de la mouche à fruits », explique Adnan. « Toutefois, cela ne s’applique pas aux ravageurs forestiers dont les populations sont beaucoup plus faibles, alors il faut trouver des façons d’établir de solides statistiques de quarantaine avec des nombres plus faibles de ravageurs. » Le nouveau processus inclut la sélection d’un représentant de huit groupes de ravageurs (5 familles d’insectes, 2 genres de champignons et le nématode des pins) qui caractérisent le mieux la variété mondiale des ravageurs qu’on peut rencontrer dans les emballages en bois. Une fois que les huit groupes ont passé les essais initiaux, on détermine le ravageur le plus tolérant au traitement et les stades de son cycle de vie. La phase d’essai final du processus consiste à réussir à décimer la quantité nécessaire de ravageurs tolérants pour satisfaire aux exigences statistiques des quarantaines. Ces opérations doivent se faire dans des conditions opérationnelles simulées afin qu’on puisse comprendre et régler les problèmes concernant la dose létale à administrer dans le bois. 

Trouver un processus acceptable pour chaque pays signataire de la CIPV est extrêmement complexe et prend beaucoup de temps, et ce n’est possible que grâce à une collaboration chapeautée par des groupes d’experts techniques pertinents et par la contribution de la CIPV. Le groupe international de recherche sur la quarantaine, un groupe consultatif de la CIPV, rassemble des chercheurs, des organismes de règlementation et l’industrie et a mis Adnan en contact avec une formidable équipe de collaborateurs. « Le Service canadien des forêts, le service APHIS du département de l’Agriculture des États-Unis et Pennsylvania State University ont été d’inestimables partenaires nord-américains pour développer la nouvelle méthodologie d’essai normalisée à l’échelle internationale et obtenir des données pour les nouveaux traitements », affirme Adnan. Dans sa phase finale d’adoption, le processus pour les nouveaux traitements phytosanitaires est maintenant entre les mains de la CIPV et de ses 183 pays signataires pour examen critique et approbation. Pour Adnan et ses collaborateurs, cette adoption représentera une incroyable réalisation. 

Compte tenu du développement de traitements évalués par un processus normalisé approuvé et gérable, les nouveaux traitements sortiront plus rapidement et une série de mesures phytosanitaires seront à la disposition des industries et des organismes de règlementation des pays commerçants. Un processus normalisé permet d’utiliser et de combiner des données de différents laboratoires afin de prouver à la communauté internationale qu’un nouveau traitement peut réduire considérablement le risque. Les traitements courants mis au point pour les emballages en bois servent aussi dans le cadre d’ententes bilatérales pour d’autres produits du bois comme les billes et le bois de sciage. Il faut applaudir ces années de discussions complexes et de travail, souvent dans l’ombre, qui mènent à des solutions qui protègent la santé de nos forêts et rendent possibles le commerce international et la prospérité des économies à long terme. 

Pour plus d’information, veuillez contacter Adnan Uzunovic.


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